En Février 1893, le conseil paroissial décide de se doter d'un orgue et de préparer l'emplacement de celui-ci dans l'église.  Une plateforme et un soubassement en bois ont été réalisés pour l'occasion, puis quelques mois plus tard, en Juillet 1893, un devis de Alfred Oldknow est présenté et discuté. 

Avant l'approbation pleine et entière du devis, le Révérend Peck et l'organiste de la paroisse, se rendent à Dinan, en l'église St-Malo, pour voir et entendre l'instrument construit quelques années plus tôt par Oldknow (le premier dans la région). L'impression ayant été positive, le devis est validé à la fin du mois de Juillet 1893.

L'orgue coûtera 7 000 Francs à la paroisse, plus 3 200 Francs pour la préparation de l'emplacement de l'instrument, la construction de la plateforme et du soubassement (soit 10 200 Francs, que la paroisse n'aura aucune difficulté à rassembler).

 

Le 8 Février 1894, Alfred Oldknow achève la construction de son nouvel orgue en l'église Saint-Bartholomew, l'instrument est doté de 13 jeux répartis sur 2 claviers et un pédalier. Quand au précédent harmonium, il sera prêté gracieusement au nouvel organiste de la paroisse, avec obligation de le rendre "lorsque son contrat prendra fin ou lorsque la paroisse estimera en avoir besoin".

 

La façade est peinte comme le veut la tradition anglaise Victorienne, la composition des jeux est elle aussi typique de la tradition anglaise et se veut avant tout conçue pour l'accompagnement des hymnes anglicans et les chœurs.

Mystérieusement, 2 registres vierges restent en attente à la console (un jeu au Great et un jeu à la Pédale), Alfred Oldknow avait-il prévu d'ajouter ultérieurement 2 registres ? Aucun indice à l'intérieur de l'instrument ne nous permet d'apporter des éléments de réponse.

 

De 1894 à 1922, les "pompeurs" engagés par la paroisse seront très souvent des enfants de la famille de Samuel Clark (greffier de la paroisse et sacristain).

 

L'orgue n'a été que très peu altéré depuis sa construction, nous notons principalement divers interventions de maintenance et dépoussiérages au fil des époques.

 

La première intervention notable est celle réalisée par François Claus (de Rennes) en 1922, puisque c'est lui qui installe une soufflerie électrique (peut-être est-ce lui également qui transforme le système de traction des notes de pédale en traction pneumatique ? Le doute plane malgré, puisque ce système de traction pourrait-être d'origine). En 1928, c'est au tour de James Ivimey (de Southampton) d'intervenir sur l'instrument pour un nettoyage.

 

Il faut attendre 1967 pour voir un relevage complet de l'instrument (grâce à la ténacité du Révérend de l'époque, Karl S. Cate), avec quelques modifications dans la composition des jeux, sur les conseils de Jean Langlais et Marie-Louise Girod-Parrot. Les travaux sont effectués par la Manufacture Beuchet-Debierre, qui en profite pour baisser le ton de l'instrument (plusieurs paroissiens s'étant plaint du ton trop élevé, qui était pourtant très courant en Angleterre) en soudant les entailles d'accord, en posant des bagues d'accord et en décalant la tuyauterie d'un ton pour certains jeux. Les travaux furent réalisé avec un budget relativement serré ce qui permit de préserver l'instrument de toute autre modifications irréversibles, ce qui ne sera pas le cas malheureusement d'autres instruments durant la même période (nous pensons notamment au petit orgue Oldknow de l'église Anglicane de Dinan, qui sera transféré au Temple Réformé de Rennes puis profondément modifié). 

 

Il est bon de noter que la paroisse St-Bartholomew avait vivement souhaitée que la personnalité de leur instrument ne soit pas altérée et qu'il conserve sont style originel, malgré quelques modifications.

Donc, en omettant ces quelques modifications, nous avons affaire à un instrument proche de son état originel, les travaux de 1967 ne modifièrent ni le système de transmission, ni l'harmonie (à quelques détails près) qui fait toute la spécificité des orgues Oldknow.

 

Nous notons par la suite, un dépoussiérage par Yves Sévère en 1971, puis une intervention de André Mack en 1975 qui essaya d'alléger au possible le toucher des claviers, qui était déjà très dur à l'époque, mais sans grand succès.

 

La dernière intervention à noter sur l'instrument, est celle réalisée entre 2014 et 2015 par Andrew Cooper (île de Wight), qui effectua un relevage complet de l'instrument, qui était alors à bout de souffle. Aucune modification n'a été apportée à l'instrument, les modifications de Beuchet-Debierre ayant été conservées. Un tuyau de façade, disparu probablement dans les années 90, fut reconstitué avec beaucoup de minutie par "The Upright Gilders" (Robert Woodland et Debra Miller).

 

Durant l'été 2021, les facteurs d'orgues Jean Deloye et Michel Formentelli, suite à une étude approfondie, ont effectués une réfection complète de la traction mécanique des notes. Depuis plusieurs années, les musiciens déploraient le manque de fiabilité et l'extrême dureté des claviers, empêchant une utilisation optimale de l'instrument. Une remise a niveau et une optimisation de la mécanique a donc été faite (changement des ressorts, fiabilisation des équerres, support pour les longues vergettes, ...), permettant ainsi un meilleur confort de jeu, comme jamais cela avait été possible auparavant.

 

(Il faut noter que chacun des relevages de l'instrument ont été financés uniquement grâce aux fonds de la paroisse Saint-Bartholomew (qui est totalement indépendante financièrement) et aux dons des paroissiens. Il est admirable de voir la vivacité et la volonté d'une telle paroisse, attachée à la mise en valeur de son patrimoine).

 

Nous sommes donc en présence d'un instrument, certes, de taille restreinte mais doté d'une belle personnalité, dont l'accent anglais sait ravir les auditeurs et musiciens. Pendant près de 110 ans, cet orgue fut le seul orgue anglais du département d'Ille et Vilaine. Il est également l'un des derniers témoins quasi-intacte de la facture de Alfred Oldknow, avec le grand-orgue de l'église Saint-Malo de Dinan, construit en 1889 (cet instrument étant le plus grand qu'il ait construit en Bretagne, 3 claviers et 24 jeux, classé Monument Historique). Ces deux instruments sont donc les seuls orgues anglais de Bretagne à avoir été construit spécialement pour leur église respectives et à être restés dans leurs lieux d'origines.

 

L'instrument est utilisé chaque dimanche pour l'office (entièrement en langue anglaise, thé/café et scones étaient servis à la fin de l'office, avant la crise Covid-19). Il est désormais mis en valeur par la saison de concerts d'été intitulé "Tea Time Concerts", sans oublier bien entendu le fameux "Carol Service" du mois de Décembre, avec ses lectures et ses chants de Noëls, attirant un public extrêmement nombreux, venu de toute la région !

Ainsi l'église, l'orgue et le cadre sont très immersifs et nous conduisent pour quelques instants aux fins fonds de l'Angleterre !